Les surréalistes du 54 rue du Château
"L’atelier du 54 rue du château, Paris 14e, fait partie de ces adresses mythiques de l’histoire de l’art. Jacques Prévert et le peintre Yves Tanguy, qui s’étaient rencontrés pendant leur service militaire, vivaient avec leurs compagnes dans cette « luxueuse maison édifiée par les soins de Marcel Duhamel ». « C’était très agréable à vivre et beaucoup de gens passaient là », se rappelle le poète au micro de Jean-Marie Drot en 1960. Marcel Duhamel, traducteur, éditeur et futur créateur de La Série noire, avait fait la rencontre de Prévert et Tanguy lors à l’armée d’Orient. Il loue en 1923 ce pavillon d’un étage, « une toute petite bicoque de marchand de peau de lapin » selon Prévert, avant de la transformer en une demeure bohème et accueillante. Dès qu’il avait un moment, il quittait le grand hôtel qu’il gérait – l’hôtel Grosvenor rue Pierre Charron, puis l’hôtel Ambassador, boulevard Haussmann – pour rejoindre le petit hôtel de ses amis. Vers 1925, Prévert et Tanguy croisent par hasard Robert Desnos dans un café de Montparnasse : ça y est, la connexion est faite avec le groupe surréaliste !"
Début de l'article de Julien Barret / Lisez la suite sur https://autour-de-paris.com/project/atelier-54-rue-du-chateau
- avec Prévert qui vous accueille à la grille du 54 rue du Château -
Entre 1923 et 1928, Marcel Duhamel, futur créateur de la Série Noire, héberge ses amis Jacques Prévert et Yves Tanguy, ainsi que leurs compagnes, dans ce pavillon qu’il a réhabilité. Un lieu mythique qui vit passer tous les Surréalistes et où serait né le cadavre exquis.
- sur la photo ci dessous : Jacques Prévert, Simone Prévert, André Breton et Pierre Prévert
Le cadavre exquis inventé au 54 rue du Château
Le Cadavre Exquis fut inventé en 1925 rue du Château. Le Dictionnaire abrégé du Surréalisme le décrit ainsi : ” Jeu de papier plié qui consiste à faire composer une phrase ou un dessin par plusieurs personnes sans qu’aucune puisse tenir compte de la collaboration ou des collaborations précédentes. “
L’exemple, devenu classique, qui a donné son nom au ” cadavre exquis ” tient dans la première phrase obtenue par cette technique : ” Le cadavre exquis boira le vin nouveau. ” Il participe du goût du hasard et de l’étrange, cher aux surréalistes, et tient à la fois du jeu de société et de la magie.
"Louis Aragon affirmera du reste qu’il n’y a pas de pensée envisageable hors des mots. André Breton lui rétorquera en guise de défi : « Qu’est-ce qui me retient de brouiller l’ordre des mots, d’attenter de cette manière à l’existence tout apparente des choses, et à leur peu de réalité » ? Disposés au hasard de leur rencontre, les mots ne sont-ils pas en mesure, comme dans une partie de scrabble, d’attester d’une surréalité face au déficit de réalité d’un monde sociétal dont il ne resterait plus qu’à saboter les codes de conduite langagiers ? En inventant d’autres stratégies d’écriture pour d’autres modes d’existence où l’insu, l’invu et l’imprévu ont surréellement droit de cité, et ce au gré des circonstances.
On aura beau taxer les exercices d’écriture automatique de délire verbal et tenir les cadavres exquis pour des niaiseries de potache, ils inaugurent le rêve d’une écriture collective qui resterait sans signataires. Écrire pour écrire, noircir du papier, et à seule fin de débusquer des phrases qui se déclarent à vous en état de somnambulisme verbal". (L’épopée collective du surréalisme : Et si le surréalisme n’était qu’une histoire à dormir debout et qui est loin d’avoir dit son dernier mot ? « Rêver les yeux ouverts et vivre les yeux fermés » fut une de ses maximes.)
Il existe aussi une vie révée en dehors du 54
Man Ray photographie une séance de rêve éveillé au Bureau de recherches surréalistes, rue de Grenelle (vers 1924) De gauche à droite : Max Morise, Roger Vitrac, Simone Breton, Jacques-André Boiffard, Paul Éluard, André Breton, Pierre Naville, Robert Desnos, Giorgio De Chirico, Philippe Soupault, Jacques Baron]. Paris, Centre Pompidou
@10000pas & artivistes in situ / 12 novembre 2023